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TSA et Pictogramme

Pourquoi les pictogrammes sont essentiels pour les personnes autistes

Dans ma pratique d’orthopédagogue spécialisée en TSA, je rencontre chaque semaine des enfants, des adolescents – et parfois même des adultes – pour qui le langage parlé ne suffit pas à dire, comprendre, organiser. Leurs besoins sont bien réels, mais ils nécessitent d'autres chemins pour être entendus. L’un de ces chemins, simples et puissants, c’est le pictogramme.

Les pictogrammes : quand l’image parle plus que les mots

Un pictogramme, c’est une image claire, sans fioritures, qui représente une action, un objet, une émotion ou une consigne. C’est un langage visuel accessible, constant et rassurant. Contrairement au langage oral, qui peut être rapide, nuancé ou abstrait, les pictogrammes restent stables. Ils posent un cadre. Ils donnent du sens.

Et pour les personnes autistes, ce sens visuel est souvent la clé d’entrée dans la compréhension du monde.

Pourquoi sont-ils si efficaces ?

🌱 Une pensée visuelle

Beaucoup de personnes sur le spectre de l’autisme pensent en images. Elles « voient » l’idée avant de la verbaliser. En proposant une image claire, le pictogramme soutient ce mode de fonctionnement naturel. Il ne remplace pas la parole : il l’accompagne, la structure, l’enrichit.

"Quand je montre une image de ‘se brosser les dents’, je vois le regard de l’enfant s’apaiser. Ce n’est plus une consigne abstraite, c’est une action concrète, visible, faisable. Lorsque ma parole s'arrète, la consigne donnée reste complètement accessible pour l'enfant, puisqu'elle est physiquement présente, sous forme d'une image."


✏️ Et quand je n’ai pas les bons pictogrammes ?

Il m’arrive souvent, dans mes rencontres, de ne pas avoir sous la main le pictogramme exact dont j’aurais besoin. Alors je prends un crayon et je dessine. Rien de parfait, juste une image simple, qui fait sens.

Ce petit geste change tout. Il dit à la personne en face : « Je vais vers toi. C’est moi qui m’adapte à ton mode de communication. » Et souvent, lorsque la personne me répond, je dessine aussi ce qu’elle me dit. Cela me permet de m’assurer que ce que je comprends correspond bien à ce qu’elle voulait exprimer. C’est une forme de validation douce, respectueuse, et incroyablement efficace. Dans la grande majorité des situations, cela permet aussi de ralentir l'échange et de capter l'attention sur ce que je dessine. Ces éléments permettent une meilleure compréhension, et donc une meilleure relations entre moi et mes apprenants.


🧭 Un repère dans le quotidien

Les pictogrammes aident à organiser le temps, à structurer les routines, à visualiser ce qui s’en vient. Un horaire illustré, un enchaînement de pictos pour le matin (s’habiller, déjeuner, brosser les dents, mettre ses chaussures…), et c’est toute une journée qui devient plus prévisible et moins stressante.

Une petite élève que j'accompagne consulte chaque matin son planning pictographié. Elle me dit en pointant les images : “Ça, je sais faire toute seule.” Quelle fierté !

Il est aussi important de rappeler que l’effet bénéfique des pictogrammes ne dépend pas toujours d’une consultation visible ou directe. Bien souvent, les personnes autistes jettent un regard subtil, rapide, presque imperceptible sur l’image. Cela peut passer inaperçu à nos yeux… mais pas au leur. Elles savent que l'information est là, accessible, constante — et cela suffit à apaiser.

Exemple de routine du matin avec pictogrammes
Exemple de routine du matin avec pictogrammes
Le simple fait de savoir qu’une information est disponible, lisible à tout moment, diminue la charge cognitive. Il n’est pas toujours nécessaire de "regarder longtemps" un pictogramme pour qu’il remplisse sa fonction sécurisante.

Une aide à la communication

Quand les mots manquent ou quand l’émotion déborde, le pictogramme devient un outil d’expression. Pour beaucoup de personne du spectre, et même pour une majorité de personne neurotypique, les grosses émotions entrainent une perte d'accès aux habiletés de communications nuancées et plus complexe. Les pictogrammes sont donc très utiles pour palier ce manquement temporaire. Un pictogramme permet de dire "j’ai faim", "j’ai besoin d’une pause", ou encore "je suis fâché", sans avoir à formuler une phrase complète, adapté dans la forme, le ton et le non-verbal. Le pictogramme favorise aussi la compréhension des consignes, surtout à l’école, où le langage oral est très présent… parfois trop.


Non, ce n’est pas « pour les petits »

Il est essentiel de sortir du préjugé selon lequel les pictogrammes sont réservés aux jeunes enfants ou aux personnes en "retard de développement". Utiliser des supports visuels adaptés à son mode de pensée, c’est une preuve d’intelligence et de résilience. Ce n’est ni infantile, ni limitant : c’est adaptatif.


Un monde plus inclusif, un pictogramme à la fois

Inclure les pictogrammes dans nos espaces (à l’école, à la maison, dans les lieux publics) ne profite pas qu’aux personnes autistes. Cela aide aussi les enfants en bas âge, les personnes allophones, ou celles en situation de stress. C’est un langage universel qui rassemble au lieu d’exclure.

Sur mon site, je travaille actuellement à la création d’une ligne de pictogrammes neutres, épurés, et pensés avec soin pour répondre aux vrais besoins du terrain. Parce que chaque image peut devenir un pont vers la compréhension. Parce qu’aucun enfant ne devrait se sentir perdu dans le langage.


Et vous, avez-vous déjà utilisé des pictogrammes ou dessiné pour mieux communiquer ?Je serais ravie de lire vos expériences et de les partager (anonymement) sur le blog pour enrichir cette belle communauté.

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